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Illustrations, Contes de Mialou, Tome I, Tome II en cours...




















"(...) La vieille femme se leva d'un bond - c'est que le labeur de la montagne lui avait permis de conserver, malgré son âge, des jambes encore robustes et agiles - et elle se munit d'une bougie, afin de rejoindre le cabanon à outils. Dehors, il faisait froid - un froid vif et cassant d'hiver - et la menace du souffle destructeur pesait partout. Dans le cabanon, il n'y avait personne. Madelyne tremblait maintenant de tout son vieux corps usé par les années de labeur de la terre et de lutte, pour repousser le souffle. Et par le froid. Et par la peur, aussi. Au sol, la vieille Madelyne remarqua soudain la loupe que Akimous était venu chercher... Il était arrivé quelque chose à son mari. Elle appela, chercha dans les coins du cabanon et, ne trouvant rien ni personne, elle ramassa la loupe. Perdre son vieux mari si soudainement, englouti par le souffle, après tant d'années de travail, d'amour, de disputes et cela juste au moment où ils avaient la possibilité de transmettre des Valeurs à tous les enfants de la terre : quel chagrin ! Elle n'avait plus qu'à mourir, elle aussi. Bravant sa peur, elle hurlait maintenant : Ragnarök ! Ragnarök ! Ragnarök ! Défiant ce dragon que nul n'avait jamais vu, implorant pour que le souffle vienne la chercher, elle aussi. Une larme de rage et de désespoir roula sur sa vieille joue pour atterrir sur le verre de la loupe...

À son contact, le verre de la loupe réagit et il se forma, sur le disque de verre de la loupe, soudainement animé par des tas de vagues, une boule lumineuse qui figea Madelyne. La clarté de la petite boule - était-ce une boule de feu, comme il en existait tant, depuis l'arrivée du souffle putride et destructeur sur Terre ? - augmenta et absorba la vieille Madelyne toute entière...

Lorsque la vieille femme rouvrit les yeux, le vieux visage familier et rassurant de son mari était penché sur le sien. Il lui sourit :

" Eh bien ! Tu en as mis, du temps, à me pleurer !

Et Madelyne, soulagée et heureuse, ne put s'empêcher de le taquiner :

- Tu as donc pleuré comme un enfant, au cabanon à outils, quand tu as mis la main sur cette foutue loupe ?

Akimous, qui était un homme fier qui ne pleurait jamais, accueillit la taquinerie avec un certain soulagement, qu'il cacha. Et si sa femme n'avait pas versé une seule larme d'amour sur la loupe, comme il l'avait espéré, que serait-il advenu de lui ? Il était devenu soudainement si minuscule dans le cabanon à outils étroit, qui était désormais immense, avec des étagères et des parois inaccessibles ! Car les deux vieillards avaient été réduits à la taille de deux fourmis, par la loupe...

- Peuh ! Pleuré comme un enfant ? Jamais de la vie ! J'ai marché sur la pioche, le manche à cogné mon oeil et ce juste au moment où je mettais la main sur cette loupe ! Alors mon oeil a coulé. Voilà !

Madelyne, qui sourit à la virilité de son mari, toujours vive malgré son âge, hasarda :

- Et qu'allons-nous faire maintenant, mon vieux Akimous ?

Akimous, qui avait eu tout le loisir d'attendre la larme d'amour de sa femme et son arrivée dans le monde de l'infiniment petit, lui sourit à son tour, fier comme Narcisse, le coq :

- Nous allons nous rendre à la fourmilière, pardi !

- À la fourmilière ? Mais pour quoi faire ?

- Pour demander de l'aide ! Nous devons, je le crois, ramener la loupe à la maison afin de retrouver le Cahier de Transmission, resté à taille normale... (...)"




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